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Emmanuel Macron Président : double méprise, double imposture

      La comète Macron, née sur l’explosion des partis politiques issus du monde dit « ancien », n’en finit pas, par la rapidité de sa désagrégation, de laisser des nuages de déceptions et d’inquiétudes dans sa trajectoire incertaine.

Double méprise !

      Dans l’électorat traditionnel des partis de gauche, et principalement du parti socialiste, de nombreux électeurs de Macron se sentent déboussolés et trompés par ce qu’ils ont cru être une nouvelle vision de la société française : ceux qui, dès le premier tour de la présidentielle, ont choisi Macron comme rempart à une domination – possible - de l’extrême droite ; ceux qui, au deuxième tour, face à Marine Le Pen, ont reporté leur suffrage sur le candidat « démocratique » qui avait accompagné François Hollande pendant son quinquennat.

      Pour tous ces électeurs socialistes, voter Macron, c’était faire le seul choix qui semblait crédible face à l’extrême droite avec la conviction que, dans la situation où se trouvaient les forces politiques, il fallait donner au Président de la République suffisamment de soutien pour résister ensuite au clan Le Pen ; avec le sentiment aussi que, si Macron échouait, la prochaine échéance de 2022 serait promise aux extrémistes de droite, les partis  républicains traditionnels ayant échoué l’un après l’autre, à gérer la situation et répondre aux préoccupations des citoyens et aux enjeux de l’avenir.

Double déception, parce que double imposture !

      Qu’en est-il aujourd’hui de ces illusions ?

      Chaque jour apporte son lot de décisions irresponsables et improvisées, de conduites autoritaires ou inconséquentes, de mépris des citoyens et de leurs préoccupations quotidiennes, de morgue envers ceux qui ne partagent pas les certitudes du pouvoir ; chaque jour, des engagements sont annoncés où l’injustice économique sert de ligne directrice, où des territoires sont négligés, où les dispositifs de taxation tiennent lieu de politique environnementale ; régulièrement, des rapports d’experts constatent que les profits issus des efforts de tous n’ont jamais autant bénéficié aux très riches pendant que la majorité de la population est appelée à réduire son pouvoir d’achat et plus grave, ses revenus ! Qui subit la hausse des taxes sur les carburants ? Qui pâtit de la hausse de la CSG, de la baisse de l’APL, de l’augmentation des mutuelles liées aux promesses de campagne ? Qui est montré du doigt pour ne pas se satisfaire de n’importe quel travail, pour ne pas se contenter des subsides régulièrement remises en cause ? Qui est fustigé pour polluer avec le diesel, pour se plaindre de vivre dans des quartiers abandonnés ? Qui est critiqué pour « râler » sans cesse devant les difficultés quotidiennes, à l’image, méprisante et périmée, de « Gaulois » rustres et inconvenants ? Et que dire d’une politique étrangère, plus sensible aux intérêts économiques d’un capitalisme débridé qu’aux enjeux humains et de solidarité ?

      Quant à la grande espérance d’une nouvelle morale, de nouvelles méthodes, pour renvoyer aux oubliettes les imperfections ou les travers des anciennes politiques et de leurs acteurs, il n’aura pas fallu un an et demi pour constater la deuxième imposture : Macron et sa bande peuvent être renvoyés au rang de politiciens nés de l’avant-dernière pluie au siècle dernier. Pire, ce sont certaines lignes blanches du bien vivre en société, jusqu’à maintenant préservées, qui sont franchies par une ambition démagogique de briser des tabous et des codes soi-disant désuets, porte ouverte aux plus fragiles pour justifier des conduites personnelles inconséquentes et dangereuses.

      Et maintenant, qui offrira dans trois ans une perspective démocratique, humaniste et juste capable de s’opposer aux extrémismes ? La cartouche Macron est partie en fumée et se révèle incapable d’inventer un cadre nouveau pour une société française soi-disant dépassée. L’extrême-droite s’imposera alors comme la seule solution qu’on n’a pas encore essayée. Vouloir renverser tout ce qui existe constitue un objectif à très court terme et n’est pas une fin en soi ; la grandeur d’un homme politique, c’est d’être capable de proposer une alternative qui repose sur une réflexion et une vision de la société à long terme, et non sur des slogans démagogiques et une ambition sans contrainte.

Roland Fleury