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Quelques 14 juillet !

14 juillet 1789

 

14 juillet 1883

 

 

Le 14 JUILLET 1919 : LE SOUVENIR DES MORTS ET DES DISPARUS

14 juillet 1919 - Poilus en 1918Le 14 juillet 1919 est la première célébration de la mémoire des morts et des disparus. Après la victoire de la Grande Guerre de 1914-1918, les rescapés défilent sur les Champs-Élysées. Cet hommage aux combattants, morts comme survivants, voulu par Clémenceau, deviendra l'ordinaire des célébrations du 14 juillet. La France a tenu "parce qu'elle était une nation", selon l’expression de l’historien J.-J. Becker. Pour la veillée d’honneur aux morts de la patrie, dans la nuit du 13 au 14, le pouvoir dresse un cénotaphe géant, entouré de canons pris à l’ennemi, sous l’Arc de triomphe. Le défilé de mille "gueules cassées", mené par le nouveau député de la Meuse André Maginot, volontaire de 1914 amputé d’une jambe, précède celui des troupes alliées victorieuses,

14 juillet 1936

 

14 juillet 1936, le Front populaire victorieux célèbre pour la première fois la fête nationale. Dans la matinée, comme de coutume, l’armée défile à Paris sur les Champs-Élysées. Dans l’après-midi, un million de personnes défilent dans l’Est parisien à l’appel des organisations constitutives du rassemblement populaire. Des cortèges identiques se déroulent simultanément dans la France entière.

Des spectacles sont enfin subventionnés, trois jours durant, par le gouvernement. La fête nationale emprunte pour la première fois à la manifestation de rue, en donnant corps à ce qu’on peut qualifier de manifestation de souveraineté, résumée par le titre du magazine : « Trois jours de fête, l’armée, le peuple, la France. »

 

 

 

 14 juillet 1944

 

Faits importants du jour

Le Maréchal conscient de ce qu’il l’attend.

J’ai confiance dans le jugement de l’Histoire !

 

 

10h00- Le Maréchal et son épouse, Longueau, Ménétrel, Tracou  à l’église St Louis de Vichy

La musique de la garde dans les parcs, sous  les fenêtre du Maréchal interprète : La Madelon, Sambre-et-Meuse, Vous n’aurez pas l’Alsace et la Lorraine.

Les Allemands ont interdit toute manifestation au monument aux morts  d’où  présence du Maréchal à un office spécial  en l’église St Louis.

L’après-midi sur la  terrasse du château de Lonzat, à l’ombre d’un grand orme qui en est le seul ornement, il confie à Jean Tracou : Il est regrettable que de Gaulle soit insuffisant, nous avons au fond les mêmes idées. Il joue dangereusement avec les sentiments des Français. Je pense que les Français plus tard  reconnaîtront que j’ai pu rendre quelques services. Nous sommes arrivés à la passe finale. On nous emprisonnera, on voudra nous déshonorer, j’ai confiance dans le jugement de l’Histoire.

Prenant à part  Jean Tracou : Renthe-Fink vous déteste, je ne peux plus vous conserver près de moi, sans vous mettre en danger. Restez près de Vichy, je viendrai de temps en temps dîner avec vous. Même le général Von Neubronn  par peur  des réactions de la  Gestapo avait averti Tracou qu’il ne pouvait plus  s’entretenir avec lui.

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14 juillet 2020

Le temps des masques

 

 

Pourquoi le 14 juillet est devenu fête nationale ? Depuis quand ? L’historien Jean Sévillia raconte les dessous de cet évènement symbolique et les enjeux de sa commémoration.

Jean Sévillia est Rédacteur en chef adjoint du Figaro magazine et écrivain. Son dernier livre Histoire passionnée de la France est paru chez Perrin.

Figarovox : Depuis quand et pourquoi le 14 juillet est-il devenu notre fête nationale ? Que commémore-t-on exactement ?

Jean Sévillia : C’est en 1880 que le 14 juillet est devenu fête nationale. Reprenons le contexte. En 1871, après l’effondrement du Second Empire et la défaite face aux Prussiens, se met en place, avec une majorité royaliste élue au suffrage universel, un régime d’attente, fait pour préparer la restauration de la monarchie, restauration qui n’aura pas lieu en raison de la division entre légitimistes et orléanistes et du refus du comte de Chambord, l’aîné des Bourbons, de composer avec les principes issus de la Révolution.

Faute de roi s’installe une République conservatrice, la République des ducs (Mac-Mahon, Broglie, etc.) En 1876, les républicains de conviction obtiennent la majorité à l’Assemblée. En 1877, ils forcent le Président conservateur, Mac-Mahon, à se soumettre en acceptant la prééminence du pouvoir législatif sur le pouvoir exécutif. En 1879, le Sénat passe aux républicains et Mac-Mahon démissionne. Commence alors la République des Jules (Simon, Grévy, Ferry), la République des républicains.

Sous le Second Empire, on fêtait la Saint-Napoléon le 15 août, date de l’Assomption, grande fête mariale dans l’Eglise catholique, fête confortée, en 1854 par la proclamation du dogme de l’Immaculée-Conception par le pape Pie IX. Le 15 août était donc la fête nationale de la France sous Napoléon III. Symboliquement, quand ils arrivent au pouvoir, en 1879, les républicains veulent donc instaurer une fête nationale qui soit en accord avec le projet politique dont ils sont porteurs : républicaniser la France, la couper de l’influence de l’Eglise.

Prise de la Bastille le 14 juillet 1789
Prise de la Bastille le 14 juillet 1789. Aquarelle d’époque, de Jean-Pierre Houël

Depuis 1872, le parti républicain organisait des manifestations privées à la date du 14 juillet. Lors d’un discours prononcé le 14 juillet 1872 à la Ferté-sous-Jouarre, Gambetta avait ainsi exalté le souvenir de la prise de la Bastille, affirmant que le peuple de Paris ne s’était pas levé « pour renverser une Bastille de pierre, mais pour détruire la véritable Bastille : le Moyen-Age, le despotisme, l’oligarchie, la royauté ».

La loi promulguée le 6 juillet 1880 annonce que « la République adopte le 14 juillet comme jour de fête nationale annuelle ». Le choix de cette date, en réalité, ratifie une pratique antérieure du parti républicain, mais en jouant sur la double signification du 14 juillet : les radicaux commémorent la prise de la Bastille (14 juillet 1789), tandis que les modérés, à qui la violence révolutionnaire fait peur, préfèrent se souvenir de la Fête de la Fédération (14 juillet 1790).

Dès lors, ce choix fera-t’il l’objet d’un consensus ?

En 1880, le 14 juillet ne fait pas l’unanimité. Ni les conservateurs, qui n’ont accepté la République que par défaut, ni les catholiques, heurtés de front par l’anticléricalisme gouvernemental, anticléricalisme qui restera le ciment du parti républicain jusqu’en 1914, ne sont prêts à commémorer un événement révolutionnaire. Jusqu’à la Grande Guerre, le 14 juillet, à l’instar de l’école laïque de Jules Ferry, restera idéologiquement marqué : il est un symbole républicain, c’est-à-dire de gauche, anticlérical et patriotique au sens des Volontaires de l’An II. Peu à peu, toutefois, il deviendra une fête populaire, avec ses bals et ses lampions.

Le 14 juillet 1919 voit le défilé de l’armée française victorieuse, derrière Joffre et Foch, avec des détachements de tous les pays vainqueurs. Les deux France se retrouvent dorénavant dans un 14 juillet qui revêt plus une signification militaire et nationale que politique. La politique revient le 14 juillet 1935 avec le défilé politico-syndical des organisations de gauche, prélude au défilé unitaire du 14 juillet 1936 qui rattache le Front populaire au mouvement de 1789.

Le 14 juillet 1945, c’est de nouveau un défilé de la victoire. A l’exception de 1989 et du défilé du Bicentenaire griffé par le publicitaire Jean-Paul Goude, la fête nationale s’est éloignée de sa source originelle. Elle n’est plus qu’une fête militaire, chérie du grand public, une fête populaire, avec ses feux d’artifice et encore ses bals de pompiers, et un micro-événement politique pour les amateurs de « petites phrases », dans les années où le chef de l’Etat parle à la télévision... Les restrictions budgétaires ont enterré la garden-party, qui était en passe de devenir une tradition mixte, à la fois républicaine dans la mesure où tout citoyen, virtuellement, pouvait être amené à fouler les pelouses de l’Elysée, et monarchique dans l’autre mesure où il fallait une invitation du Château pour y participer.

On a fait de la prise de la Bastille l’élément fondateur marquant le début de la Révolution française. Est-ce vrai ? Est-ce réellement la borne qui marque « le début de la fin d’un monde » ?

Le 20 juin 1789, quand les députés du tiers-état qui se sont proclamés les mandataires de toute la population française, excluant de la représentation nationale la noblesse et le clergé, se rassemblent dans la salle du Jeu de Paume, à Versailles, et font serment de ne pas se séparer avant d’avoir donné une Constitution à la France, la Révolution commence vraiment, puisque les institutions qui maintenaient l’ancienne France deviennent caduques.

Il en est de même pour le 4 août 1789, où ce qu’on appelle improprement « l’abolition des privilèges », privilèges qui représentaient en réalité l’organisation socio-territoriale de droit coutumier de l’Ancien Régime, marque l’entrée dans un monde nouveau. Le 5 et 6 octobre 1789, quand la foule ramène la famille royale à Paris et que le roi est prisonnier de la révolution parisienne, marque aussi la fin d’un monde.

La prise de la Bastille était-elle un mouvement populaire spontané, une révolte plébéienne contre l’arbitraire, ou bien une manipulation des masses orchestrée par le haut ?

Le 12 juillet 1789, Camille Desmoulins appelle les Parisiens à prendre les armes. Le 14 juillet au matin, quelques milliers d’émeutiers envahissent les Invalides, et prennent armes et canons. A l’autre bout de Paris, la Bastille, prison d’Etat dénoncée par les libellistes comme un symbole de l’arbitraire royal, est assaillie non par la population spontanément mobilisée, mais par une bande d’agitateurs qui ont préparé l’opération. De l’édifice sont extraits, en fait de victimes de l’absolutisme, sept prisonniers, dont quatre faussaires, deux fous et un débauché.

Le gouverneur Launay, qui a capitulé devant l’émeute et qui a été conduit à l’Hôtel de Ville, est assassiné avec Flesselles, le prévôt des marchands, leurs corps étant dépecés et leurs têtes placées au bout d’une pique. 83 assaillants ont péri dans l’assaut. Le premier sang de la Révolution a coulé. L’opération a été orchestrée, mais elle a revêtu tout de suite un sens politique et une dimension symbolique.

On évoque souvent les mots de Louis XVI dans son journal le jour de cet événement historique : 14 juillet : rien, pour montrer l’aveuglement et la nonchalance du roi. Comment se fait-il que ce dernier ne se soit pas rendu compte de l’importance de l’évènement ?

Rappelons d’abord que ce « rien » consigné par Louis XVI dans son carnet désignait son tableau de chasse, vide en l’occurrence puisqu’il n’avait pas chassé ce jour-là. Il est néanmoins exact que le roi n’a pas tout de suite pris la mesure de ce qui s’est passé à la Bastille, d’où le dialogue, authentique ou apocryphe, survenu lorsqu’on lui a raconté les événements : « Mais c’est une révolte ? - Non, Sire, c’est une Révolution ! » Horrifié par le récit de la mort de Launey et Flesselles, Louis XVI sera conforté dans son refus de verser le sang, disposition d’esprit qui va lui dicter sa conduite face à la Révolution.

Le 14 juillet peut-il être le moment permettant la réconciliation des deux histoires de France, révolutionnaire et contre-révolutionnaire, dans la « République, notre royaume de France » chère à Péguy ?

La question me semble un peu dépassée, dans la mesure où la vie politique française ne s’organise plus du tout autour de l’axe pour ou contre la Révolution. Le débat sur la Révolution n’est pas épuisé intellectuellement, mais il n’a pas de traduction politique immédiate. En sens inverse, le 14 juillet d’aujourd’hui n’a pratiquement rien à voir avec la Révolution, ce qui était déjà le cas en 1989, lors du défilé du Bicentenaire évoqué plus haut. Encore une fois, le 14 juillet n’est plus que la fête de l’armée, ce qui déplace le débat : le rituel militaire est-il vraiment compris dans une époque où le patriotisme n’est plus enseigné, où l’armée est invitée à se battre pour les droits de l’homme et non pour le territoire national ou les intérêts extérieurs du pays, et où le sens du sacrifice renvoie à une morale en voie de disparition ?

Eugénie Bastié