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6 juin 1944 à Saint-Etienne. Pourquoi Saint-Etienne ?

6 juin 1944 Hôtel de ville Saint-Etienne

"Les sanglots longs des violons de l’automne." Sur la côte les résistants reçoivent le message de l'imminence du débarquement. Pendant ce temps là la ville de Saint-Étienne panse ses plaies. Les Stéphanois sont encore sous le choc du bombardement du 26 mai et le Maréchal Pétain vient pour remonter le moral des victimes avec notamment une visite du quartier Saint-François très touché.

Visite écourtée

Les archives officielles évoquent une foule dense. Dans les faits, il y a beaucoup moins de ferveur que pour la visite de Pétain en 41. Des écoliers des miliciens font nombre sur la place de l'hôtel de ville et puis surtout le maréchal écourte sa visite. Pas d'entrevue avec les blessés de l'hôpital Bellevue. Il dira simplement : "mes chers amis, des opérations militaires viennent d'être déclenchés sur le territoire. Vous comprenez pourquoi je dois quitter plus vite votre ville".

La veille Pétain était à Lyon

5 juin 1944, le Maréchal Pétain arrive à Lyon sous haute escorte, après une visite à l’hôtel de ville, il se rend à l’hôpital de Grange Blanche au chevet des malades et blessés. L’après-midi, il retourne place des Terreaux où les derniers fidèles se pressent pour le célébrer. La propagande parle alors de 20 000 personnes, même si ce chiffre est au final très éloigné de la vérité. Quelques Lyonnais sont présents, mais ils sont bien moins nombreux qu'en 1940. L'après-midi, Pétain se dirige vers Vaise pour constater les dégâts engendrés par le bombardement des alliés du 26 mai 1944. Le Maréchal prend la pose pour les photographes et tente de profiter de la situation pour retourner l’opinion.

Le débarquement

Pétain termine son voyage lyonnais au château du Tourvéon, à Collonges, où il passe la nuit. À son réveil, il est directement informé du débarquement en Normandie. Selon la légende, rapportée par Henri Amoretti dans son livre Lyon Capitale 1940-1944, le Maréchal serait alors rentré dans une rage folle et aurait renvoyé les écoliers venus lui chanter la MarseillaisePierre Laval le presse de rentrer rapidement à Vichy, mais Pétain refuse et part comme prévu à Saint-Étienne. Là, il est acclamé depuis le balcon de l’hôtel de ville.

Le 6 juin, dans l'après-midi, Pétain lance son appel au "peuple français" lui demandant de ne pas se mêler aux combats, "n'aggravez pas nos malheurs" et "d’observer une discipline rigoureuse". Il est trop tard pour les collaborateurs, la liberté est en marche.

 Ainsi la visite à Saint-Etienne correspondant au jour du débarquement marque le débutde la déstabilisation du Régime . Laval ne voulait pas que Pétain maintienne son voyage à Lyon et Saint -Etienne. L'histoire raconte que le matin à Lyon ,Pétain, apprenant le débarquement , se mit dans une grande colère. Des enfants,avaient été prévus pour chanter La Marseillaise à son réveil .Ils les renvoya sans ménagement . C'était le début de la fin .

 

De Saint- Etienne à Sigmaringen….pour finir l'histoire

Bernard Frank avait bien résumé les choses : «Vichy, c'était grotesque, ça ne pouvait finir qu'à Sigmaringen, dans la cucuterie la plus totale.» En effet. De septembre 1944 à fin avril 1945, Hitler ayant réquisitionné la résidence des Hohenzollern pour y loger la crème de la collaboration hexagonale, Vichy n'en finit pas de finir sous les tourelles pointues de Sigmaringen.

Ils sont tous là, ou presque, à révéler la vraie nature de leur régime, en jouant les prolongations pendant que l'histoire les dépasse à toute allure, que Drieu avale du gardénal à Paris et que les tribunaux de la Libération font exécuter Brasillach. Coincés dans la même souricière, à s'éviter, s'espionner, se haïr: Pétain, vieillard déchu qui souffre de la prostate dans son «Olympe» du 7e étage ; Laval, qui crame ses réserves de Lucky Strike en préparant son procès, du cyanure dans la doublure de son manteau ; Brinon, qui rêve d'être calife à la place du Maréchal tandis que Doriot lorgne la place à 25 kilomètres de là.

Mais encore Darnand, dans son uniforme de la Waffen SS ; Déat, qui s'obstine à signer des arrêtés ministériels ; Bonnard, qu'on traite en douce de «gestapette» ; Rebatet, qui pérore sur cette «communauté réduite aux caquets» ; et Céline, naturellement, Céline qui transformera bientôt ce «pittoresque séjour» en opérette infernale dans «D'un château l'autre». Sigmaringen, c'est «Secret Story» sur les bords du Danube. 

Guy Chambefort